Archéologie de la Grande Guerre

Amine Boukhliq

Alors que les traces de la Première Guerre mondiale disparaissent peu à peu des paysages, les commémorations du centenaire de la Première Guerre mondiale ont mis en lumière l'apport de l’archéologie dans la compréhension du conflit et la préservation des vestiges.

Archéologie préventive et Première Guerre mondiale

Dans les années 1990, les grands travaux d’aménagement (autoroutes, TGV) sont précédés, dans les vastes espaces ruraux, de diagnostics et de fouilles archéologiques préventives . Dans la région Grand Est, et dans les Haut-de-France, ces opérations sont notamment réalisées sur les anciennes zones de front et les archéologues sont alors confrontés aux vestiges du premier conflit mondial et à ses spécificités : une période mal connue des archéologues, en prise avec la « mémoire vivante », la présence de munitions encore actives et la découverte de corps de soldats.

Dès les années 2000, l’archéologie a pris en compte certains vestiges de la Première Guerre mondiale et le caractère pluridisciplinaire des recherches a permis d’apporter des perspectives nouvelles, notamment dans les domaines de l’étude de la vie quotidienne et de la mort des combattants. Depuis, les opérations d’archéologie préventive sur la Grande Guerre se sont multipliées dans la région Grand Est. Prescrites par le préfet de région (DRAC Grand Est, service régional de l’archéologie), en amont d’un projet d’aménagement, elles sont réalisées avant la destruction des vestiges par les travaux.

Parmi les divers chantiers archéologiques entrepris dans la région, certains ont connu une large médiatisation. On pensera plus particulièrement aux opérations suivantes :

- les fouilles préventives des cimetières allemands de Boult-sur-Suippe (Marne, 2015, réalisées par l’Institut national de recherches archéologiques préventives) et du cimetière provisoire français de Spincourt (Meuse, 2017-2018, réalisées par l’Institut national de recherches archéologiques préventives), qui constituent un saisissant témoignage de la gestion de la mort de masse (400 tombes localisées),

- la fouille programmée du camp de repos allemand du "Borrieswalde" (Ardennes),

- ou encore la fouille du site exceptionnel de Carspach "Kilianstollen" (Haut-Rhin, 2011, réalisée par Archéologie Alsace) avec sa galerie de 125 mètres, écroulée en 1918, ou vingt-et-un soldats allemands avaient été ensevelis.

La mise en place de partenariats avec l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC), dans les départements de la Meuse et de la Marne, a permis une meilleure prise en compte des découvertes fortuites, mais régulières, de corps de combattants sur les anciens champs de bataille.

Commémorations de la Première Guerre mondiale

Les agents du service régional de l’archéologie de la DRAC Grand Est ont largement contribué aux nombreuses initiatives liées aux commémorations du Centenaire. Ainsi, plusieurs dossiers sont consacrés à l’archéologie de la Grande Guerre et aux diverses fouilles réalisées dans la région, sur le site internet développé par la Mission centenaire ou le site  archeologie1418.culture.fr , créé par le ministère de la Culture.

Les nombreuses commémorations et manifestations (expositions et colloques, comme celui sur l’archéologie des c onflits c ontemporains, méthodes, apports et enjeux , organisé du 11 au 13 octobre 2018 à Verdun), ont également permis de faire le point sur la recherche et de faire prendre conscience au grand public de la fragilité des vestiges de la Première Guerre mondiale.

Un patrimoine fragile et menacé

Afin de conserver, dans les meilleures conditions, ce patrimoine mémoriel qui jalonne le territoire du Grand Est, certains de ses éléments « remarquables » bénéficient d’une protection au titre des monuments historiques. Ainsi, la première protection portant, en France, sur le patrimoine de la Première Guerre mondiale, date de 1920 et concerne la plate-forme de tir d’artillerie du canon allemand de 380, à Zillisheim (Haut-Rhin).

À la veille des commémorations du centenaire de la Grande Guerre, une quarantaine de monuments est protégés dans le Grand Est et, entre 2016 et 2017, l’État, préfet de région, a inscrit 15 nouveaux monuments, parmi lesquels des nécropoles, mémorials, cimetières, carrés militaires, inscriptions, etc., contribuant à la sauvegarde et à la mise en valeur de ce patrimoine.

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