Présentation géographique de la Bretagne

Mise à jour : 07 décembre 2015
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Image71640 : ©ministère des Affaires Sociales, de la Santé et des Droits des Femmes

Le premier trait caractéristique des paysages de Bretagne, celui qui en conditionne tant d’autres, c’est la présence de la mer et la systématique proximité des 2730 kilomètres de côtes. « Péninsule spectatrice de l’océan » en disait Pline l’Ancien.

Les paysages de Bretagne sont d’abord les paysages d’un cap à l’extrémité occidentale de l’Eurasie, d’une avancée de terre dans l’océan Atlantique, des paysages de bout du monde. La découverte de ces paysages après de longues heures d’approche, comme leur fréquentation quotidienne à distance des centres continentaux, ne peut faire abstraction de cette position géographique sur la façade atlantique. Pour la Bretagne, la conscience d’être sur une péninsule est d’autant plus forte que le schéma est reproduit à différentes échelles, comme un emboîtement infini de caps, une déclinaison fractale du bout du monde. Les saillants des caps et des îles ne sont pas les seuls à développer les paysages maritimes. A l’inverse, les incisions profondes des rias bretonnes, les abers, ces vallées fluviales où la mer remonte à chaque marée jusque 10 voire 20km, sont un signe tangible de la présence de l’océan. De fait, la spécificité des paysages bretons réside probablement moins dans l’opposition entre l’Armor (la mer = le littoral) et l’Argoat (la forêt = l’intérieur) que dans l’imbrication intime des paysages maritimes et intérieurs. Dans ce paysage d’interface terre-mer, la complémentarité des ressources de la pêche et de l’agriculture côtière se traduit par des densités humaines plus fortes sur les littoraux atlantiques.

Car la péninsule n’est pas seulement la fin de la terre, c’est aussi le début de l’océan. Le far-west du réseau ferroviaire est à l’inverse le point de départ des liaisons maritimes. Ainsi les littoraux n’ont pas toujours été des culs de sac, mais bien davantage des ouvertures aux communications maritimes, des voies de passage pour les migrations atlantiques et transatlantiques, que les préhistoriens nommeront les « western Seaways ». Du fait de l’attractivité économique et commerciale du littoral, une des caractéristiques des paysages est l’implantation des villes en situation de fond de ria, à la limite de pénétration des marées : Dinan, Tréguier, Lannion, Morlaix, Quimper, Quimperlé, Hennebont etc. Du point de vue maritime cette situation est favorable à la construction de ports abrités des tempêtes de la côte. Du point de vue terrestre ces villes-ports sont aussi des villes-ponts, implantées là où la vallée devient plus étroite et donc aisément franchissable.

Pour l’essentiel, le relief est constitué de plateaux, de collines et de crêtes, dont les altitudes subégales donnent cet aspect de massif ancien aux altitudes modestes, fortement aplani par l’érosion. Les points les plus élevés sont inférieurs à 400 mètres, liés à des roches résistantes comme le grès armoricain ou à des structures résistantes à l’érosion comme les schistes quartzites redressés du Roc’h Trévezel qui culminent à 384 mètres dans les Monts d’Arrée. L’ensemble armoricain est donc dominé par des paysages peu élevés aux dénivelés très doux et progressifs, même si localement le rehaussement et la reprise de l’érosion dans des roches plus résistantes, découpe des vallées encaissées qui imposent leur rythme à ces paysages « en creux ».

Le climat océanique aux faibles amplitudes thermiques et précipitations constantes sur l’année impose les paysages verts de l’herbe, surmontés du ciel changeant des temps ventés. La contrainte climatique est déterminante pour le paysage à deux titres : d’une part elle imprime sa marque directement sur la végétation, l’agriculture et les activités économiques en général, d’autre part elle conditionne le vécu des paysages par la luminosité, la visibilité, le crachin, les hurlements du vent…

C’est principalement par ses paysages agraires que la Bretagne se distingue, caractérisés par un habitat dispersé, des parcelles encloses et des systèmes orientés vers l’élevage. Les paysages sont verdoyants et l’arbre y est omniprésent. Paradoxalement, les étendues forestières sont réduites (10 % de la surface), dominées par la chênaie-hêtraie caractéristique du domaine tempéré. Là où les sols sont pauvres, lessivés, acides, la lande atlantique, formée de bruyères et d’ajoncs, se développe largement. Lorsque les conditions topographiques et pédologiques sont plus favorables, l’ancienne mise en valeur agricole a produit des paysages d’enclos. Le bocage, associé à une dispersion de l’habitat, développe ses haies vives et dégage un maillage de parcelles plus ou moins dense. Les cultures légumières, très présentes sur les sols limoneux de la côte nord, offrent des paysages ouverts très spécifiques.

La population bretonne s’est caractérisée pendant longtemps par un dynamisme naturel soutenu, alimentant notamment des flux migratoires importants vers d’autres régions françaises, et même au-delà. La vitalité démographique a depuis subi quelques revers, avec une dégradation réelle du mouvement naturel, et une structure par âge vieillissante. Le solde migratoire est en revanche excédentaire depuis le milieu des années soixante, mais l’analyse qualitative des flux par tranche d’âges révèle des départs massifs des populations jeunes, compensés par un retour des adultes actifs et des retraités. Les plus grands centres urbains ont commandé un processus de polarisation puissant et leur croissance s’est progressivement étendue à des vastes auréoles périurbaines, autour de Rennes, Brest, Vannes et l’ensemble des villes moyennes. D’autre part, le XXe siècle se caractérise également par un processus de concentration de la population et des activités sur le littoral. L’Armor enregistre ainsi une croissance démographique importante, donnant lieu à un liseré de forte densité continu sur le littoral méridional, alors que l’implantation est beaucoup plus discontinue au nord. A l’opposé, les espaces intérieurs – l’Argoat – apparaissent déprimés sur le plan démographique et maintiennent un tissu économique orienté principalement sur l’agriculture et ses transformations industrielles.

Ces caractéristiques sociales et spatiales ont façonné un environnement globalement propice au développement de la région. En 2013, la Bretagne occupe la douzième place en ce qui concerne le produit intérieur brut par habitant des régions de France métropolitaine, là où elle n’était que 19ème en 1990. Cette situation s’explique essentiellement par son profil d’activité économique, où plusieurs filières de production se caractérisent par une faible valeur ajoutée. La région se distingue simultanément par un taux de chômage inférieur à la moyenne nationale.

C’est avant tout un pays à vocation terrienne. Les mutations économiques de la seconde moitié du vingtième siècle ont permis à la région de passer d’un système polycultural traditionnel à une agriculture d’orientation productiviste, intégrée à l’économie de marché et à un complexe agro-alimentaire puissant mais aussi déséquilibré. D’autre part la Bretagne a mis à profit une tradition maritime pour devenir la première région de France par l’effectif des pêcheurs, le tonnage et la valeur des prises.

Sur le plan industriel, les grandes délocalisations impulsées par l’Etat dans les années soixante ont encouragé un développement de plusieurs branches d’activité, qui représentent aujourd’hui une réelle spécificité régionale. Elles concernent principalement les secteurs de la construction automobile et navale, et des activités électriques et électroniques. Malgré ce renouveau industriel, l’activité secondaire reste sous-représentée. Enfin, la région bénéficie d’un essor touristique récent et important, qu’elle doit à un patrimoine naturel et culturel particulièrement riche et varié.

La Bretagne, avec sa position occidentale et pointant vers l’Atlantique, occupe une place originale au sein de l’espace français. Ses paysages, sa culture, ses modes de vie lui garantissent une certaine unité et lui confèrent une forte identité.

©Laurence Le DU-BLAYO
Agrégée et Docteur en géographie
Maître de Conférences à l'Université Rennes2
UMR CNRS ESO 6590
©Olivier DAVID
Agrégé et Docteur en géographie
Professeur à l'Université Rennes 2
UMR CNRS ESO 6590